La rose de Blida

Article : La rose de Blida
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19 mars 2020

La rose de Blida

 » Seul le rossignol comprend la rose. »

Proverbe indien
Elles sont là, loin du tumulte… Ph. Mekfouldji

Elle s’essouffle, elle tend sa grâce vers la courbe de l’échine en ces lieux connus pour être le paradis de ses semblables. Mensonges ! La rose de Blida a perdu sa couronne, elle devient une plante quelconque, même pas de la famille de ces fleurs dites « sauvages ». C’est elle, la rose, qui devient sauvage ! Elle a même reçu dernièrement une consœur faite de plastique en se voulant éternelle… A Blida, petit à petit, la rose à laquelle s’identifiait toute une ville, est devenue anonyme.

Sous les feux de la rampe…Ph. Mekfouldji

Fini le temps où des sillons permettaient de l’irriguer avec une eau limpide ayant traversé un oued qui puise son origine dans les espaces du Saint de la ville, Sidi Kebir. Cette fleur, au nom porté dès la naissance par nombre de filles, Warda, n’émerveille plus dans sa ville d’adoption, Blida. Les quartiers de la ville l’ont reniée depuis des décennies, les plantes sauvages et la saleté ont pris sa place. Béton, brique, ciment, grisaille : l’ambiance d’amertume ne peut même pas être remplacée par des coups de pinceaux de peinture, même « moderne »! Un mur demeure un mur, un espace fermant l’accès à l’extérieur ou à l’intérieur, c’est selon. Une rose existe pour sa beauté, ses couleurs, ses senteurs, sa fraîcheur, son exubérance.

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Roses symbole. Ph. Mekfouldji

Autrefois, des maisons portaient des noms de fleurs : Géraniums, Glycines, Lilas, Roses, …  ! Elles ne sont plus là désormais pour rendre compte d’un passé qui a été rasé. Les maisons-châteaux d’aujourd’hui sont anonymes ou c’est de la même famille de « C’est un don de Dieu ». Dieu a permis de construire en détournant, pour beaucoup, des millions de dinars. Leurs propriétaires plantent aussi des fleurs mais on devine avec quelle absence de goût ! Puisqu’elle n’est pas appréciée à sa juste valeur, la fleur dans ces espaces s’ennuie. Les résidents de ces espaces passent sans la renifler, sans la regarder et elle finit par s’y habituer. Dur de ne pas se faire reconnaître dans cette jungle sans âme. Elle se laisse alors envahir sans regrets par des plantes sauvages et des insectes viennent la butiner, lui ôtant, sans vergogne, son apparat au travers de ses pétales imbibés de rosée et de lumière.

La rose au fil des années, des décennies…

Finis les jours, les mois et les années où une symbiose s’installait entre la fleur et son jardinier, finit l’amour qui les liait et la complicité qu’ils présentaient devant Dame Nature. Les pépinières, dernier espace où la fleur de Blida trouve refuge, font se rencontrer les gens ayant à l’esprit la beauté de cette reine.Mais cela démontre que les espaces familiaux n’entretiennent plus au quotidien ces fleurs, et que les résidents de cette ville préfèrent les acheter en bouquets pour des cérémonies. Elles ne tarderont donc pas à flétrir, à faner puis à rendre l’âme. 

Fleur ou gâteau, tu seras enseveli…Ph. Mekfouldji
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