Abdelkrim Mekfouldji

Blida, La céramique : Un art méconnu à Blida

Un art qui se consume lentement à Blida : la céramique. La Chambre des Arts et Métiers tente difficilement de préserver ce pan du patrimoine blidéen, et même national. Farida Chabane en est une représentante et elle en veut aux autorités de ne pas lui avoir ramené le four tant désiré pour la cuite des travaux réalisés et qu’elle doit finir à haute température. Elle entend faire partie des délégations algériennes exposant à l’étranger uniquement afin de pouvoir s’offrir les moyens si modestes d’un artiste dans cette spécialité. « La céramique manque d’encouragement par rapport aux autres arts ; nos responsables privilégient la musique et la peinture mais nous avons également notre public et cet art offre un visage éclairé de la civilisation algérienne. Il faut voir ce que réalisent nos voisins marocains et tunisiens ! »

Tant d'amour dans la flamme
Tant d’amour dans la flamme

Effectivement, l’argile ne manque pas dans la région de la Mitidja, région dont la capitale est Blida et cette matière première facilite le travail pour la réalisation et pour la formation. « Toutes les vitrines du pays peuvent être ornées avec toute cette géométrie dont nous détenons la maîtrise » assure celle qui est fière de défendre son métier contre vents et marées. Djamel, connaisseur en céramique, se dit « fier de parler des œuvres de la jeune fille, œuvres qu’on peut admirer au niveau de la pâtisserie La Royale à Blida. »

Un art présent à Blida
Un art présent à Blida

Un des responsables au niveau de la direction des Arts et Métiers à Blida, Outalia Abdelkader, rassure : « Nous faisons souvent appel à nos artistes dans les dizaines de spécialités et chacun verra son tour arriver d’exposer mais personne n’empêche ces artistes de se constituer en associations et programmer des tournées. Il ne faut point attendre l’aide de l’Etat pour émerger. » Cette sentence a été sèche et se veut également une ouverture sur le « compter sur soi. » Mosquées, bibliothèques, musées, directions administratives, bureaux d’avocats et de médecins : tous les domaines de l’activité professionnelle ont souvent besoin d’un objet représentatif de la culture locale. Le directeur pour la wilaya de Blida, M. Bensalem Réda, se veut tout de même réconciliant : « Nous laissons nos portes ouvertes pour toutes le spropositions. »

Un couscoussier avec la nature comme symbolique
Un couscoussier avec la nature comme symbolique


Blida, Rentrée scolaire pas sûre

Près d’un mois depuis la rentrée scolaire en Algérie et Blida continue de traîner nombre de retardés : élèves exclus et non repris malgré les promesses, enseignantes n’ayant pas rejoint par la faute de l’éloignement, classes surchargées avec notamment 62 élèves pour une classe de terminale section sciences. De jeunes enfants à l’école primaire déjà pressés de prendre quelques jours de vacances et des parents désemparés de ne pouvoir inscrire leurs enfants de moins de six ans. Un mois qui donne froid dans le dos. « J’avais des élèves qui réagissaient au quart de tour aux questions et aux interrogations à chaque rentrée mais impossible de les voir réveillés cette année » assure Nordine, un professeur de mathématiques dans le secondaire.Rentrée scolaire

« J’ai préféré changer de filière à travers un recours plutôt que de subir certaines matières qui ne mènent à rien » déclare Amina, élève en 2ème année secondaire. « Je n’aime pas l’histoire et j’ignore pourquoi on m’oblige à apprendre des noms et des dates pour des personnes et des périodes totalement étrangères à moi » assure naïvement Bouchra, une enfant en 3ème année moyenne. Pour M. Ould Ali, « faire aimer l’Histoire et la géographie est du ressort de l’enseignant qui doit s’investir totalement dans son cours ». Nabila est au collège et elle aime bien s’étaler en expression écrite dans les trois langues enseignées mais « les profs nous demandent une demi-page pour voir seulement si nous sommes capables de mettre des phrases après d’autres phrases ! » Une affaire à suivre pour ces quelques élèves de Blida d’ici à la fin de l’année scolaire.
En attendant, la rentrée n’a pas été conséquente.


Blida, cimetières à l’agonie

Mémoire d’un peuple, tombes livrées aux affres du néant dans une ville plusieurs fois centenaires ! C’est le constat de nombre de ses citoyens qui voyaient en ce vendredi saint, celui du 13 septembre, un état lamentable du cimetière de Sidi Hallou, un des plus anciens. « C’est ici qu’est enterré Ben M’rah, le seul martyr des événements du 8 mai 1945 mais qui parmi les vivants connait son existence ou même ce pan de l’Histoire de la ville des roses ? La rue Yousfi Abdelkader, adresse des cimetières tout à la fois juif, chrétien, musulman dont un de rite Ibadite, est à elle seule toute une histoire avec son prolongement vers la vieille ville de Douirette au sud et son débouché au nord sur la cité du 19 Juin, ex. cité musulmane. Tous les résidents du grand quartier populaire en veulent aux responsables successifs élus à la tête de la commune de Blida qui n’avaient point réussi à tenir leurs promesses d’une prise en charge des doléances pour une vie meilleure et une prise en charge du patrimoine. « Nous pourrions faire énormément dans le cadre de l’emploi des jeunes uniquement en tenant compte du volet historique du quartier avec ses multiples cimetières et les lieux de bataille de l’ALN sur le piémont débouchant sur l’atlas tellien » affirme Mohamed Mouzaï, la soixantaine, et qui vient de prendre sa retraite. « J’aurais voulu me consacrer maintenant à l’écriture de l’histoire de la région mais où trouver les documents et les témoignages ? Il nous manque cet indispensable relais que sont les archives de la ville mais allez tenter d’en trouver au siège de la commune » conclut sur un ton triste Si Mohamed.Tombes abandonnées
A l’entrée du cimetière de Sidi Hallou où sont enterrés également M’hamed Yazid, Mustapha Baghdadi (plusieurs fois maire de Blida), Hadj Messaoud Mohamed et ses fils, Dahmane Benachour et tant d’autres hommes et femmes, le portail d’entrée est défoncé, une quelconque administration est absente, les tombes laissées à l’abandon et des troupes de moutons et de chèvres s’alimentent en toute aisance. Personne ne peut vous renseigner sur des noms, des dates, des histoires liées aux périodes successives ayant enregistré l’enterrement de ces hommes. En face de l’entrée un long mur de clôture qui protège le cimetière chrétien. Celui-ci bénéficie depuis quelques années déjà d’une réelle prise en charge par l’ambassade de France qui emploie deux salariés à plein temps afin d’entretenir les tombes et les allées. Le résultat est encore bien perçu à partir des lacets menant vers la montagne de Chréa : alignements parfaits où est ressentie cette ambiance sereine propre à ce genre de lieux. Quelques mètres au sud de Sidi Hallou, sur la montée vers le quartier de Agba l’hamra, le cimetière juif est à l’abandon dès l’entrée avec le dépôt d’ordures empêchant l’accès à l’intérieur. Il est plus que honteux de devoir subir au quotidien un spectacle pareil avec des jeunes et des moins jeunes qui déposent le plus tranquillement du monde leurs sacs poubelles en ce lieu.
Les autorités gagneraient à trouver une solution à ce gâchis aussi bien physique que spirituel, les morts ne pouvant plus se plaindre.

Plus d'un siècle pour ce cimetière
Plus d’un siècle pour ce cimetière


Le théâtre comme échappatoire

Médéa, à 40 km de Blida et moins de 100 km d’Alger, se targue de disposer d’un festival de théâtre décernant chaque année « la grappe d’or » de la meilleure pièce de théâtre mais cela ne suffit point pour faire de la ville et de la région un centre d’apprentissage pour le théâtre. « Nous aimerions bien voir la concrétisation de la promesse d’un théâtre régional à Médéa, projet pour lequel le précédent responsable de la culture à Médéa, M. Ayache, s’y employait » révèlera M. Ould Medjbeur. Ce dernier déclare posséder le théâtre dans le sang mais il poursuit ses études en 1ère année de gestion à l’université de Médéa. « Toutes les productions parvenant d’Egypte, de Turquie ou d’un autre pays me permettent d’étudier et d’analyser les expressions corporelles, le mouvement et les intonations de la voix ; c’est de la formation gratuite mais sans enseignant » conclut le jeune Seif Eddine.

Des jeunes s'intéressent aux activités théâtrales
Des jeunes s’intéressent aux activités théâtrales

Les deux comédiens qui se sont produits à Boufarik et Blida jouent du théâtre depuis l’âge de 10 ans : « Nous étions dans la troupe Afrah chez M. Benechnacha qui est également auteur de pièces » révèle M. Ould Medjbeur avant que le jeune Talbi renchérit en affirmant qu’il apprend encore aujourd’hui chez M. Hilali. Ayant le jeu théâtral dans le sang, ils font également partie de l’équipe détentrice l’an dernier de la Grappe d’or avec la pièce « Le médecin malgré lui », une adaptation de Ahmed Khoudri.
Ils promettent de revenir prochainement avec une pièce plus étoffée mais donnent rendez-vous pour la fin de ce mois de septembre à Médéa avec la tenue du festival « La Grappe d’or ».


Algérie : l’alphabétisation, une priorité pour « la ville des roses »

Au total, 756 heures d’enseignement pour une durée de 18 mois, avec l’objectif tracé de faire disparaître l’analphabétisme d’ici 2016, c’est la mission donnée à l’office de lutte contre l’analphabétisme, un office rattaché au ministère de l’Education nationale. Selon certains agents bénévoles et affiliés à l’association « Iqra », le volontariat a été la force première pour conjurer un des maux sociaux dont souffrent les citoyens. Il est à observer, uniquement pour la wilaya de Blida, un taux de 12,80 % d’analphabètes : un taux élevé au regard des efforts consentis depuis l’indépendance pour l’éducation nationale.

A l’occasion du festival « Lire en fête » qui s’est tenu à Blida au niveau du Centre d’information de la 1°RM, le stand réservé à l’alphabétisation ne chômait pas, avec l’afflux d’un public, notamment adulte et féminin, en quête de plus de renseignements sur les possibilités et facilités accordées afin de profiter de cette ouverture. « J’ai besoin d’apprendre pour au moins lire le Coran » dira une maman venue avec trois de ses enfants. Un parent s’est dit enthousiasmé à l’idée d’inscrire sa mère pour les cours du soir à Oued El Alleug. Cette dernière localité, avec un statut de région rurale, approche le quart d’analphabètes avec le chiffre de 18 300 personnes ne sachant ni lire ni écrire. « Nous avons l’Arba, Meftah et Boufarik comme le triste palmarès des daïras de la wilaya de Blida où le taux d’analphabètes dépasse les 25 % », déclarera une responsable qui montrera que le pourcentage des citoyens de ces régions s’étant inscrits dans leurs structures ne dépasse pas les 8,30 %, soit moins de 13 000 personnes.

La priorité va vers la femme et les régions rurales

La priorité va vers la femme et les régions rurales, mais des écueils sont présents tels les programmes jugés rebutants, l’inconscience de certains responsables de structures qui n’encouragent guère les apprenants, le volume horaire -6 heures  par semaine- jugé insuffisant. Une enseignante évoqua la priorité des vieilles femmes qui s’inscrit dans l’apprentissage du Coran et des préceptes religieux afin de faciliter le pèlerinage aux Lieux saints.
Six ministères impliqués dans cette mission : Education nationale, Culture, Jeunesse et Sports, affaires sociales, Affaires religieuses et Intérieur, mais les résultats ne sont pas ceux attendus même si beaucoup de progrès ont été réalisés à travers la population carcérale et les jeunes filles du secteur rural.
Des programmes appropriés et tenant compte du sexe et de la tranche d’âge, ramèneraient sans doute plus de candidats à l’apprentissage : tel est le constat issu du débat avec les responsables du stand et quelques citoyens venus s’informer durant ces journées de « Lire en fête » à Blida. « Il n’est pas facile d’intéresser ma mère à des contenus que moi-même j’ai des difficultés à suivre » déclarera une jeune enseignante présente. La révision des programmes serait-elle à l’ordre du jour dans un proche avenir ?IMG_1493

 

La daïra regroupe plusieurs communes.

La Wilaya est une division administrative variant en superficie et prérogatives, cette appellation équivalant selon les Etats au département, ) la région ou à la province.